Gastromot 2
Saison 9 - 2011-2012 - n° 1 - 20 septembre 2011
À la cuisine des mots pour un menu “gastromot”
Double croche
La cuisine de Marie
Version n°1
Il m’avait
invitée, c’était la première fois. Une surprise qu’il tenait à me faire, avait-il
dit en conduisant sur une petite
route sinueuse de montagne.
La terrasse
de la petite auberge était encore ombragée. Une brise agréable rendait la canicule accumulée supportable en ce début de soirée, et après avoir siroté un apéritif,
personne ne nous a demandé de
choisir le menu. C’était « plat du
jour de la patronne ».
Le patron
quant à lui, dressait la table en souriant idiotement. Une affaire de famille : deux tables et eux seulement
pour le service. Il fallait connaître l’endroit pour atterrir dans ce lieu étrange. En fait, mon amoureux avait réservé et ils nous attendaient.
L’entrée
nous fut assez rapidement servie : des encornets farcis. Dès
la première bouchée, une déclinaison
de saveurs épicées, grillées envahit mon palais. C’était moelleux à
l’intérieur, croustillant à l’extérieur, surprenant dans ces
consistances contradictoires. Un zeste de citron, un filet d’huile d’olive, un
soupçon de gingembre…Quel hors-d’œuvre !!
Découvrir à
chaque bouchée un ingrédient invraisemblable
est un plaisir jouissif.
Le patron souriait toujours aussi béatement.
Le patron souriait toujours aussi béatement.
Ensuite, nous eûmes droit à « un pavé
d’aventures à point » : sublime ! Des aventures en veux-tu en
voilà, des aventures de chevaliers, de pirates, de cow-boy, de criminels en tout genre, des
aventures à l’eau de rose, sentimenthalo ou encore des épiques, des héroïques.
Incroyable ! Je sentais qu’elles étaient vraiment à point. La cuisson
était parfaite. Ce plat d’aventures me réjouissait l’âme autant que le palais.
C’était un vrai bonheur que de déguster ces aventures jusqu’à lors inconnues.
Le patron au
sourire avenant nous servit « une mousse au chocolat façon Zola ». Le chocolat était
amer, profond, la mousse légère, onctueuse : un terril dans une coupe de
porcelaine blanche. Trop beau ! Trop fondant ! Trop bon ! Insolite !
C’est au
moment où la patronne sortit de sa
cuisine en essuyant les mains sur
son tablier que son patron de mari
déboucha alors un « château sans pagne rosé ». Idée
lumineuse !! Feu d’artifice dans la coupe et dans la bouche. De petites
bulles explosaient lentement en copiant Mozart. J’avais
alors ressenti la beauté de la vie. C’était tout simplement
magique : la patronne était une artiste, le patron (au sourire malicieux)
semblait sortir d’un conte. Nous étions tous les quatre ravis, joyeux, heureux…
J’aurais aimé que cet instant dure
toute la vie.
Dommage
qu’il ne m’ait invitée qu’une
fois .
Il m’avait
invitée, c’était la première fois. Une surprise qu’il tenait à me faire, avait-il
dit en conduisant sur une petite
route sinueuse de montagne.
La terrasse
de la petite auberge était encore ombragée. Une brise agréable rendait la canicule accumulée supportable en ce début de soirée, et après avoir siroté un apéritif,
personne ne nous a demandé de
choisir le menu. C’était « plat du
jour de la patronne ».
Le patron
quant à lui, dressait la table en souriant idiotement. Une affaire de famille : deux tables et eux seulement
pour le service. Il fallait connaître l’endroit pour atterrir dans ce lieu étrange. En fait, mon amoureux avait réservé et ils nous attendaient.
L’entrée
nous fut assez rapidement servie : des encornets farcis. Et
farcis à quoi, s’il-vous-plait ? Dès la première bouchée, une déclinaison de saveurs amères, iodées, grillées
envahit mon palais. C’était moelleux à l’intérieur, tendre à
l’extérieur, surprenant dans ces consistances similaires. Du citron, de l’huile d’olive, de la moutarde aux câpres, mais aussi un arrière gout de marée
…Quel mélange !!
Découvrir à
chaque bouchée un ingrédient
invraisemblable peut être déroutant.
Le patron souriait toujours aussi béatement.
Le patron souriait toujours aussi béatement.
Ensuite, nous eûmes droit à « un pavé d’aventures
à point » : Aïe, Aïe aïe ! Des aventures en veux-tu en voilà,
mais seulement des aventures de
cul. Incroyable ! Je sentais qu’elles étaient vraiment à point, c’est sûr. La cuisson était
parfaite. Ce plat d’aventures me réjouissait le corps autant que le palais.
C’était une réelle aventure que de
déguster la plupart de ces aventures jusqu’à lors inconnues.
Le patron au
sourire pervers nous servit alors « une mousse au chocolat façon Zola ». Le chocolat était amer, profond, la
mousse légèrement trop compacte : un terril dans une coupe de porcelaine
grise. Trop triste ! Trop sinistre, mais… insolite.
C’est au
moment où la patronne sortit de sa
cuisine en essuyant les mains sur son tablier taché que son patron de mari effrayant brandit un impressionnant coutelas. Il se dirigeait vers nous de
manière inquiétante quand il
sabra énergiquement un « château sans
pagne rosé ». Idée saugrenue !!Explosion de verres, jet de liquide sanguinolent. Des bulles explosaient furieusement. J’avais alors ressenti la peur de ma vie.
C’était tout simplement dramatique, ça virait au cauchemar : la patronne
était une empoisonneuse, le patron
semblait sortir d’un asile et mon amoureux … détala au triple galop !
J’aurais
aimé que cet instant n’existe pas.
Je n’ai
accepté ses invitations qu’une seule
fois.
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